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Xavier Munschy (1900-1941)
le tragique destin d'un Blodelsheimois méconnu !

Liens familiaux de Xavier Munschy
 
Xavier Munschy est né à Blodelsheim le 20 septembre 1900, fils d’Étienne Munschy et Marie, née Judas.

En 1900, Étienne et Marie Munschy furent les acquéreurs de la propriété : rue du Rhin, située juste en face du monument aux morts actuel érigé en 1961.

Ils eurent sept enfants, dont l’ainée Joséphine est morte après quelques mois.
 
Voici les noms et prénoms des enfants d’Étienne et Marie Munschy, de leurs épouses ou époux et années de vie.
 
En 1899 naquit Joséphine (1899-1978) mariée à Victor Decker, suivie de Xavier (1900-1941) marié à Mathilde Wirth, puis Théodore (1902-1980) mariée à Cécile, née Haas, puis Anna (1903-1990) mariée à Emile Decker, Eugène (1906-1990) mariée à Eugénie, née Peter et Stéphanie (1911-2001) mariée à Albert Witz.

Xavier Munschy se fit photographier en 1915 devant la porte d’entrée de la maison de ses parents.

Voici la photo de toute la famille d'Étienne et Marie Munschy en 1918…

Les enfants d’Etienne et Marie Munschy grandirent dans les années d’avant-guerre, puis de la Première Guerre mondiale avec les incertitudes et peurs de ce temps.
 
La Première Guerre mondiale fut une tragédie, d’où 21 enfants Blodelsheimois ne reviendront pas.

Louis Stahl, né le 5 mars 1900 fut le plus jeune d’entre eux.
 
Xavier Munschy, né le 20 septembre 1900, échappa donc de justesse à l’incorporation dans l’armée allemande, l’Alsace faisant encore partie du Reich allemand jusqu’à la fin du conflit.
 
Nous voilà dans l’après Première Guerre mondiale où le Traité de Versailles fut signé en 1919.
 
Dans une Alsace redevenue française, Xavier Munschy devint soldat français et son parcours jalonné de nombreuses étapes, il a servi au 107e régiment d’artillerie à Belfort.
 
Le 1er août 1921 il fut affecté au 274e Régiment d’Artillerie d’Afrique. Il fut en campagne dans l’Armée du Levant en Cilicie et Syrie.
 
Le 27 mars 1922 il fut affecté au 3e Régiment d’Artillerie de Campagne puis mis en disponibilité le 20 mai 1922.
 
Il intègre le 313e Régiment de Campagne le 16 juin 1923 puis le 305e Régiment d’Artillerie de Campagne le 1er octobre 1924.

Tout en étant affecté à un régiment, le 15 juin 1922 il intègre la Police de Strasbourg, où il occupa la fonction d’inspecteur de sûreté.

Né en 1902, Théodore, un des deux frères de Xavier fut aussi soldat français au sortir de la Première Guerre mondiale... et rappelé à la fin des années 1930 pour la Ligne Maginot !

A cette époque l’Allemagne était mise sous surveillance, dans la Ruhr notamment, par des forces françaises, belges et britanniques.
 
Pour la France c’est l’Armée du Rhin qui effectua cette surveillance.
 
Xavier Munschy a intégré cette Armée du Rhin et fut affecté dans un Service de sûreté pour lequel il se porta volontaire car on avait besoin de commissaires et d’agents sachant parler l’allemand.

Que fit cette Armée du Rhin dans la Ruhr ?
 
Elle fut une Armée d’occupation et de surveillance en Allemagne après la Première Guerre mondiale.
L'occupation de la Ruhr fut une opération politico-militaire en Allemagne entre janvier 1923 et août 1925. 

Après la Première Guerre mondiale, qui a débouché sur l’occupation de la Rhénanie par les forces alliées, l'occupation de la Ruhr et de ses sites de production industrielle par des troupes françaises et belges de janvier 1923 à juillet-août 1925 témoigne de la fragilité des accords de Versailles. Cette occupation militaire entend s'opposer par la force au défaut de paiement des indemnités de guerre calculées à l'origine lors du traité de Versailles, lesquelles restaient largement inopérantes sous la république de Weimar.
Déclenchée par l'arrêt des livraisons de bois allemand, décidée par le président du Conseil français Raymond Poincaré, en accord avec le roi des Belges (Albert Ier) et soutenue par les majorités parlementaires de France et de Belgique, l’invasion débute le 11 janvier 1923. Elle a pour objectif d’occuper les centres de production de charbon, de fer et d’acier de la vallée de la Ruhr pour obtenir les montants dus par l’Allemagne. 

Cette opération suscite une vague de résistance passive, des mouvements de grève, des incidents et affrontements et des actes de sabotage, repris ensuite par la propagande nazie. Face au désastre économique, le gouvernement du chancelier Gustav Stresemann appelle cependant, en septembre 1923, à l’arrêt des actions de résistance passive et met fin à l'hyperinflation. Il s'engage à respecter les obligations imposées par le traité de Versailles et proclame l’état d’urgence : l’agitation publique se transforme en certains endroits du pays, en émeutes voire en tentative de coup d’État contre la république de Weimar, lors du putsch de la Brasserie de Hitler et Ludendorf. Des attentats ont également lieu contre les troupes belges. 

Sur le plan international, cette occupation provoque un sentiment de sympathie à l’égard de l’Allemagne mais aucune action concertée, aucun pays ne voulant prendre la responsabilité d'une remise en cause du traité de Versailles. Confrontées à leurs propres difficultés économiques car elles ne tirent pas suffisamment de ressources de cette imposition, la France et la Belgique finissent par accepter les propositions du plan Dawes et retirent leurs troupes en juillet et août 1925. Elles évacuent DüsseldorfDuisbourg et l’important port fluvial de Ruhrort
Le 25 août 1925, l’occupation de la Ruhr est terminée. Celle de la Rhénanie se poursuit encore jusqu'en 1930, avec le soutien des Britanniques. 
Des points de vue français et belge, l’opération ressemble à un échec : elle démontrait que la communauté internationale ne veut rien faire au sujet des différends persistants entre la France et l'Allemagne. Cela est à mettre en rapport avec la passivité des signataires de Versailles lors de la récupération de la Rhénanie par Hitler en 1936, au mépris du traité de Versailles. 
Pour en revenir à Xavier Munschy, il fut donc un inspecteur de la Sûreté française, chargé de fournir des renseignements sur les agissements des racoleurs de la Reichswehr.

Xavier Munschy a pu découvrir les menées secrètes de ces nationalistes allemands dont le Westfalentreubund.
 
Dès son entrée en fonction il fut de ceux qui arrêtèrent un courrier secret d’un certain Hugo Stinnes, riche industriel allemand, pour les forces politiques allemandes de l'époque.
 
De suite les nationalistes allemands placardèrent partout des écriteaux : « Attention aux espions alsaciens ».
 
Xavier Munschy fut visé personnellement par un attentat le 9 juin 1924.
 

La presse alsacienne s'est emparée de l'affaire et diffusa largement l'information en juin 1924.

En 1992 le Journal historique de L'ALSACE évoqua l'attentat par un dessin révélateur !

Pour son action, Xavier Munschy fut décoré de la médaille d'Or du dévouement et des belles actions par le Général Degoutte le 14 juillet 1924. 

Dans les années 1924-1929 il continua son travail d’inspecteur à Strasbourg pour le compte de la Sûreté nationale.
 
De temps à autre il revient voir ses parents et ses proches à Blodelsheim.

En 1929 il pose candidature pour un poste d’Inspecteur de Police spéciale.
 
Une enquête fouillée eut alors lieu sur lui, diligentée par le Ministère de l’Intérieur.
(un document très complet nous fut envoyé par les Archives Nationales qui atteste cela).
 
En 1930 sa candidature fut retenue et Xavier Munschy devint donc Inspecteur de Police spéciale à Strasbourg.
 
En juillet 1936 il se mari avec Mathilde Wirth.

En septembre 1939 les alsaciens et mosellans proches de la frontière sont évacués dans le Sud-Ouest.
 
Durant l'été 1940 les nazis s’installent à Strasbourg.

On le verra rapidement, Xavier Munschy ne fut pas oublié par l’occupant nazi !
 
Laissons à présent la parole à Albert Witz, beau-frère de Xavier, qui se maria avec Stéphanie, la petite sœur de Xavier…

Xavier Munschy fut rapidement convoqué par les nazis, interrogé, relâché, mais menacé.

"...là où vous irez nous vous retrouverons !"

Dès l'annexion de l'Alsace-Moselle par les nazis, ceux-ci ont donc convoqué Xavier Munschy en l'attirant dans un guet-apens à Strasbourg à l'aide d'un courrier truqué prétextant une maladie de son épouse restée à Obernai, alors que Xavier avait déjà rejoint la Zone Libre à Vichy... d'ailleurs de sinistre mémoire !

Après son interrogatoire, il fut relâché, mais son sort fut scellé.

En mars 1941 il écrivit une lettre prémonitoire à sa chère maman...

Xavier pensa trouver un refuge pour une courte durée à Lyon, avant, semble-t-il, de prendre la direction de l'Afrique, probablement en Tunisie.

Les nazis, eux, furent déjà à Lyon, où ils furent accueilli par la France de Vichy. 

Xavier ne put plus fuir, il l'avait sans doute pisté.

Ils lui auront fait payer son action dans la Ruhr dans les années 1923 - 1924 et sa non allégeance à l'occupant nazi en 1940 !

...suite du mémoire d'Albert Witz

Pour se rendre aux funérailles de Xavier, Stéphanie et Albert Witz ont dû ruser pour traverser la Ligne de Démarcation !

De 1938 à 1968, Albert et Stéphanie Witz, vécurent au Château de Sully (Saône-et-Loire) en qualité d'intendants.
Durant ces années de guerre, ils firent partie d'un Réseau de Résistance appelé "Alliance" ils en parlèrent à l'occasion de leurs Noces d'Or en 1985. Ils vécurent de près les affres de de l'annexion de la France dans les années de guerre.
Xavier Munschy fut le beau-frère d'Albert et le frère aîné de Stéphanie, née en 1911.

En juin 1941 Xavier Munschy se trouva sur une liste des convois funèbres...

Après l'assassinat de Xavier Munschy, son épouse Mathilde est allée chez sa soeur installée à Bizerte en Tunisie où son beau-frère fut militaire de carrière.
Les années qui suivirent, Mathilde envoya régulièrement des cadeaux à Marie Munschy, sa belle-maman à Blodelsheim, jusqu'à ce que celle-ci décède en 1952.
Témoignage d'Henri Decker.

Albert Witz écrivit le mémoire ci-haut qu’il dédia à ses petits-enfants en 1985.

Dans les années 1990, Claude Munschy et Émile Decker, pour qui Xavier Munschy fut un oncle, ont effectué de nombreuses recherches afin de connaître les meurtriers de Xavier, validé par un document officiel. 

En 2021 et 2022 nous avons essayé d'en savoir plus auprès des :

- Archives Départementales du Bas-Rhin
- Archives Départementales du Rhône
- Archives de la Ville de Lyon
- Service Historique des Armées de Caen et de Versailles
- Archives Nationales de Peyrefitte-sur-Seine
- Associations diverses, dont celle des Malgré-Nous
- Fondation de la Résistance à Paris - Département AERI

Toutes ces entités nous ont répondu avec gentillesse, mais aucun document officiel sur la mort de Xavier Munschy ne semble exister.

Pour une personne spécialisée dans les meurtres de Résistants, par les nazis, milices, police corrompue puis la Gestapo de Barbie assassinés au Fort de Montluc à Lyon notamment, à qui j'ai relaté l'histoire de Xavier Munschy, cela ne fait pas l'ombre d'un doute, qu'il a été assassiné, soit par les nazis eux-mêmes, soit par des hommes de main commandités par eux, avec la complaisance de la Police lyonnaise ?


En 2023 avec le Dr François Munschy nous avons encore tenté de connaître la vérité, validée par un document officiel issu des archives de la police lyonnaise, malheureusement à ce jour, en vain !
 
Un grand merci pour leur aide :

à Monsieur Jean-Laurent Vonau, professeur émérite, juriste et historien Alsacien auteur d'ouvrage de référence sur la cause alsacienne lors de la Seconde Guerre mondiale
à Madame Frédérique Neau-Dufour, historienne française de renom 
à Madame Aurélie Dessert, directrice du Mémorial National de la Prison de Montluc à Lyon
à Monsieur Michel Salager, Président de la Société Lyonnaise d’Histoire de la Police
 

Voici ce que nous a écrit Monsieur Salager le 24 juillet 2023 :

 

Pour l'instant, ce policier nous est totalement inconnu. Il ne figure pas non plus dans les listes de policiers mentionnés dans divers ouvrages sur la Résistance. Je vais demander au SGAMI, s'ils ont un dossier le concernant, s'il a été affecté à Lyon ou sa région. J'ai vu que l'acte de décès l'avait enregistré sous le patronyme de Munchy. En juin 1941, il y avait des Allemands à Lyon qui était le siège d'un gouvernement militaire. Il semble qu'il y ait des agents de la Gestapo présents en région lyonnaise. C'est aussi le début de la création de la Police nationale et de la police régionale d'État par Vichy. 

Des exécutions à cette époque par la Gestapo ou l'Abwehr, c'est possible mais très rare. Une collusion de la Police avec l'Occupant à cette époque, c'est aller vite en besogne. La Milice, n'est pas en place. Il y a des groupes collaborationnistes, mais ??

Nous allons regarder aussi s'il y a eu une procédure judiciaire à la suite de son décès de mort violente. La famille avait-elle déposer une plainte, saisi la justice ? Pour l'instant, pas de trace aussi de cet événement dramatique. Si on connaissait le lieu ?

Nous allons rechercher.

Cordialement

 

Michel Salager

Président de la Société Lyonnaise d’Histoire de la Police






Ce thème dédié à Xavier Munschy est proposé en guise de mémoire sur ce site internet afin que sa vie, à la fin tragique, soit connue des Blodelsheimois, plus de 80 ans après sa mort sordide !

Xavier Munschy fut un authentique Blodelsheimois, il mérite le rappel de son histoire, quoi que, bien tardive, au même titre que l'histoire des victimes militaires et civiles des deux Guerres mondiales de Blodelsheim.

Pour leurs témoignages, un grand merci à :

- Henri et Anna Decker, Blodelsheim
- Monique et Jacques Gény, Rixheim
- Janine Munschy, Sainte-Croix-aux-Mines
- Lucien Munschy, Huningue
- Véronique Zimmermann, Blodelsheim
- Dr François Munschy, Bitschhoffen
- et à toutes les personnes contactées qui font un travail de mémoire sur la Deuxième Guerre mondiale, qui nous ont apporté aide et conseil.

Une pensée particulière pour Albert Witz, Claude Munschy et Emile Decker, sans eux, ce travail de mémoire n'aurait pas été possible !

Dans le MI DORF N° 15 de juin 1991, pour les 40 ans de la disparition de Xavier Munschy, Emile Decker évoqua son grand-oncle où il résuma sa vie et sa traque finale tragique.


Nous clôturons ce thème dédié à Xavier Munschy par un petit documentaire vidéo.

Cliquer sur la note musicale pour le son.

Patrick Decker, Blodelsheim, 2023.

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